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texte de lecture "Popocatepelt et Citlaltepelt" (légende aztèque)

 
Les Aztèques sont des indiens venus au nord du Mexique et qui se sont fixés au 14ème siècle dans la région marécageuse où s'éleva leur capitale Tenochtilàn (devenue Mexico).

Le Popocatepelt (5 432 m) et le Citlaltepelt (5 700 m) sont les deux plus grands volcans du Mexique. Leurs sommets sont le plus souvent couverts de neige...


 
Il fut un temps où les Aztèques régnaient sur le Mexique. C'étaient de farouches guerriers, toujours prêts à combattre aux côtés de Tezcatlipoca, dieu de la guerre et de la nuit.
Popocatepelt étaient de ceux-là : brave comme cent ours, rapide comme la foudre, il était le soldat le plus valeureux de l'armée royale.
Quand Citlaltepelt, la fille du roi, le vit, elle tomba profondément amoureuse de ce garçon, aussi beau qu'un dieu.
Et Popocatepelt aima sur-le-champ cette jeune fille plus belle que l'azur. Ils se jurèrent un amour éternel et le roi consentit avec bonheur à leur mariage.
- Vous êtes fait l'un pour l'autre, leur dit-il.

Sur les lèvres des deux amants vint un sourire radieux. Jamais leurs coeurs n'avaient battu aussi fort.
- Nous allons organiser de somptueuses fêtes pour votre union, mes enfants, déclara le roi.

Mais le destin en décida autrement. Un messager se rua vers le roi.
- L'ennemi est aux portes de la ville, ô roi ! Ils saccagent, ils pillent, ils tuent ! 
Ce fut le branle-bas de combat ! Le roi rassembla aussitôt ses troupes et en confia le commandement  à Popocatepelt.
- Défends la cité, jeune héros, et défends aussi ton amour.
Citlaltepelt regarda longuement son cher Popocatepelt. Ils se serrèrent une dernière fois l'un contre l'autre.
- Attends-moi, princesse, je jure que je reviendrai, dit le jeune homme.
Et il se rua à la tête de ses soldats.

La bataille fut terrible. Et ce fut la première d'une guerre sans merci où, tour à tour, les deux armées eurent le dessus. Tantôt la ville clamait sa joie devant la fuite de l'agresseur, tantôt l'armée royale battait en retraite, poursuivie par la multitude ennemie. L'affrontement dura des mois et des mois. Beaucoup d'hommes avaient déjà rejoint le noir royaume de Tezcatlipoca.
« Si Popocatepelt meurt dans cette bataille, je n'y survivrai pas », songeait Citlaltepelt. Et elle fouillait l'horizon, guettant éperdument la silhouette de son cher promis.

Mais il revenait toujours sain et sauf, après chaque affrontement, et elle le pressait contre son coeur en pleurant de joie.
- L'heure de la victoire va venir, disait Popocatepelt.
C'était vrai. L'armée royale parvint à remporter une victoire capitale et ce jour-là, Popocatepelt, au premier rang, frappant sans relâche l'ennemi de son épée d'or, fut le héros du triomphe aztèque. Il réussit même, dans cet ultime et sanglant combat, à ne pas recevoir l'ombre d'un coup.

Quand les ennemis se furent enfuis, et qu'il régna en maître sur le champ de bataille, il prit le temps de remercier Tezcatlipoca par quelques sacrifices, bien qu'il lui tardât de revoir Citlaltepelt.

Cependant, le chef de l'armée ennemie, humilié, ruminait sa vengeance. Il réunit quelques soldats.
- Nous sommes vaincus, mes amis. Mais je n'ai pas dit mon dernier mot. Je vais faire payer notre déroute à ce chien de Popocatepelt, et au plus profond de son coeur !
Alors, tous revêtirent des habits aztèques volés à l'adversaire et ils entrèrent dans la ville en liesse.
- La victoire est totale, hurlaient-ils aux côtés des soldats royaux.
Et, à voix basse, en gémissant, ils ajoutaient que Popocatepelt avait donné sa vie pour sauver le royaume.

Bientôt, la nouvelle se répandit dans toute la cité et parvint jusqu'à Citlaltepelt. La jeune fille refusa d'abord de croire l'épouvantable rumeur, mais mille fois elle lui fut répétée. Elle finit par tomber à genoux, comme foudroyée. Elle maudit Tezcatlipoca, elle maudit les dieux, elle maudit le monde tout entier.
- Puisque mon amour est mort, je m'en vais le rejoindre, moi aussi.
Elle s'étendit sur une couche de satin, ferma les yeux et tomba dans une terrible langueur. Le roi, affolé, envoya les meilleurs médecins à son chevet mais rien n'y fit.

Citlaltepelt rendit son dernier soupir au moment même où Popocatepelt, acclamé et triomphant, entrait dans la ville. Quand on lui apprit la mort de sa jeune promise, il devint d'une pâleur terrible et courut près d'elle.
Ni les clameurs de la foule lui faisant fête, ni les paroles émues du roi ne purent atténuer son immense douleur.
- Pourquoi Tezcatlipoca ne m'a-t-il pas dérobé la vie sur le champ de bataille ? hurlait-il. Pourquoi vivre si mon amour est perdu à jamais ?
Il s'était agenouillé devant le corps sans vie de sa bien-aimée et contemplait le beau visage aux yeux clots.
- Laissez-moi, murmura-t-il.

Tout le jour, il resta ainsi, immobile, le regard fixé sur sa fiancée morte. Enfin, quand les festivités célébrant la victoire se furent évanouies, à la nuit tombée, il alluma deux grandes torches, prit dans ses bras le corps de sa promise, et sortit de la ville. Plus jamais on ne les revit. Popocatepelt avait emmené sa bien-aimée dans les ultimes ténèbres. C'est du moins ce que les Aztèques crurent tout d'abord.
Mais le lendemain, quand l'étoile du matin commença à briller, deux nouveaux volcans dominaient la ville. Ils crachaient feux et flammes vers le ciel d'azur, comme deux torches gigantesques. Et, au flanc des deux montagnes, les coulées de lave se rejoignaient.
C'étaient Popocatepelt et Citlaltepelt. Au-delà de la mort, ils s'aimaient encore et leurs deux âmes brûlaient pour l'éternité d'une flamme vive et claire.